La « little frenchie » gauche et timide avait fait place à une brindille provocante, en cuissardes et micro-jupe. Entre mes sorties « downtown », les balades forestières avec les enfants, les « parties » organisées par Ann et Peter et les émissions « top of the pops« , les jours s’écoulaient à une vitesse impressionnante. Mes progrès en Anglais étaient fulgurants. Je pensais, je rêvais dans la langue de Shakespeare. A tel point que je cherchais mes mots quand un ami français m’appelait au téléphone. Londonienne jusqu’au bout des ongles, je n’imaginais même plus l’existence d’une autre planète…
Un matin, quelqu’un sonna à la porte. Un instant je crus m’évanouir. Non, bien sûr, ce ne pouvait être lui. Il me le confirma en se présentant : Chris, le neveu de la famille, le clone de Mick Jagger ! My God ! A cet instant précis, je sus que mes bonnes résolutions de sagesse s’envoleraient comme plume au vent. Mais, chut !… je n’en dirai pas plus à ce sujet….
Les Edwin Hawkins Singers chantaient « happy day » et chaque jour était un heureux jour. Et ce jour où je flânais dans Carnaby Street, fut mémorable.
Je m’étais attardée devant une vitrine de chapeaux, hésitant entre un feutre rouge et une capeline emplumée de jaune citron. A ce stade de réflexion, je n’avais pas remarqué la silhouette plantée derrière moi. De l’intérieur de la boutique, les Stones hurlaient « gimmie shelter » et je ne pus m’empêcher de battre le rythme. A ce moment, je sentis un regard moqueur et je me retournai. Il tira longuement sur sa Gitane en me scrutant de haut en bas et de bas en haut. Puis, en soufflant la fumée dans ma direction, il esquissa un sourire. Monsieur Gainsbourg me tétanisait déjà et j’eus la sensation de rater une occasion unique de lui avouer mon admiration.
De retour à Muswell Hill, je m’évertuai à évacuer l’émotion du jour. Pendant que les toasts grillaient, les enfants prenaient leur bain et machinalement je lavai quelques tasses qui traînaient…Quand soudain, l’apocalypse !
De la cuisine où je me trouvais, j’entendis un craquement suspect provenant de la salle à manger attenante. Le temps d’essuyer une tasse, et le monde s’écroula….En fait, le plafond de la salle s’écroula…Dans un nuage de plâtre blanc et un bruit effroyable, il s’effondra ! Je restai clouée au sol, bouche bée, un torchon dans une main, une tasse dans l’autre. Si j’avais bougé de cinquante centimètres, je me serais trouvée sous les décombres !
Lorsque le nuage de plâtre s’estompa un peu, j’aperçus la silhouette d’Ann, toute blanche et immobile sur une marche de l’escalier du salon. Les premiers mots qui me vinrent à l’esprit furent : « A so beautiful ceiling, what a pity ! »…
Ce à quoi, imperturbable, elle me répondit : « Oh well, let’s have a cup of tea » !!!
Ah ce flegme britannique 🙂
Pour le plafond, la réaction est extrêmement anglaise. Je n’ai vu qu’une fois la dame de ma famille anglaise perdre légèrement son flegme, c’est quand son petit chien de concours au nez écrasé (particulièrement laid et bête) est passé sous une voiture en sortant de la maison. Les autres enfants et moi, on était ravi.
J’aimeJ’aime
Quand on pense que les Anglais disent « it » en parlant d’un bébé, et « he » ou « she » en parlant d’un animal….tout s’explique 🙂
J’aimeJ’aime
Quand on pense que le type de Top of the pop était un gros dégoutant qui a ruiné la vie de nombreux gosses…
J’aimeJ’aime
mouais…
J’aimeJ’aime
L’épisode de Gainsbourg me laisse rêveur. Ces chroniques de ton apprentissage à la vie britannique est ma tasse de thé. Quand je disais que tu savais raconter les histoires… Celles-ci en plus sont vraies, ce sont les tiennes. Continue Louv’, nous sommes suspendus. So long.
Jonas
J’aimeJ’aime
J’ai traversé Abbey road sur le fameux passage piétons… alors il me semble l’avoir vécu, ce périple, de chansons en chanteurs, dans la capitale de la musique moderne.
J’aimeJ’aime
Les studios de Abbey Road sont aujourd’hui classés monument historique. Qui l’eût cru à l’époque de la révolution Pop ?….
J’aimeJ’aime
waouh ! quelle époque !
oui, je vote pour le livre !
J’aimeJ’aime
waouh ! j’ai donc du pain sur la planche 🙂
J’aimeJ’aime
Il y a du vécu là dedans et les idoles ne sont jamais bien loin. Bises Dan
J’aimeJ’aime
Oh que oui, tout est absolument véridique. Et les idoles omniprésentes….
J’aimeJ’aime
Merci pour ton récit.Tu écris si bien..Et merci pour les Stones!!Bises Belges…
J’aimeJ’aime
Merci pour le compliment 🙂 Entre nous, j’aime beaucoup aussi la Belgique !
J’aimeJ’aime
oh, mais tu vas l’écrire , ce bouquin, c’est obligé ! témoin d’une époque aussi riche, et douée d’un tel talent pour recréer les ambiances, tu y es condamnée
J’aimeJ’aime
tss tss…de nombreux témoignages existent déjà, mais il est vrai que l’on écrit bien que ce que l’on connait bien…alors…why not ?
J’aimeJ’aime
J’adore ta façon toute Britannique de raconter, on y est vraiment!
J’espère que d’autres parties arrivent…4, 5, 6, 7, 8…..et les autres:)
merci Louv’
J’aimeJ’aime
Il faudrait un bouquin pour tout raconter, mais ce n’est pas le but 🙂
Je me fais juste un petit plaisir en ressassant ces vieilles histoires, mais si ça te plaît, tant mieux !
Bises.
J’aimeJ’aime