bleu comme une orange

 « Il nous faut peu de mots pour exprimer l’essentiel » . Mais les mots me manquaient ce jour-là. Pour en avoir noirci mille pages, pour les avoir prononcés mille fois, la source s’était tarie.

« Le front aux vitres comme font les veilleurs de chagrin… » je scrutais l’horizon, transperçant la brume de mes pensées vagabondes. « Un orage emplit la vallée, un poisson la rivière »…la vallée était vide et la rivière desséchée. Et je m’apprêtai à refermer la page.

Quand je l’entendis qui gémissait. Il était là, à terre, piétiné, bafoué. « Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous » me susurrait cette drôle de voix venue d’ailleurs. Il semblait inconsolable et je craignais qu’il inondât ma planète. Mais j’étais émue et lui murmurai « pleure, les larmes sont les pétales du coeur ». 

Curieusement, mes paroles produisirent l’effet contraire, et il se mit à rire. Un peu vexée je lui tournai le dos. C’est alors qu’il m’entoura de la tiédeur de ses ailes. A l’instant je lui pardonnai sa ruse et fondis comme Chamallow dans la bouche.

Des jours durant, qui me parurent des siècles, « j’adorais l’amour comme à mes premiers jours ». Puis, ce démon farceur disparut soudainement de mon tableau surréaliste. Ne laissant sur mes lèvres que l’étrange saveur douce-amère d’une orange bleue.

« Rien n’est simple ni singulier » ….me rappela cette drôle de voix venue d’ailleurs.

 

paul eluard

Merci à Paul Eluard, de m’avoir prêté ses mots.

25 réflexions sur “bleu comme une orange

  1. Claude Tamet de Bayle 13 février 2022 / 12:37

    Jean, étonne-moi, disait Diaghilev à Cocteau.
    Ton talent, Martine, m’étonnera toujours.

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  2. Claude Tamet de Bayle 12 février 2022 / 22:35

    Que disais-je ?

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    • louv' 17 février 2015 / 11:13

      Merci les cafards 🙂

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  3. Jonas D. 16 février 2015 / 11:53

    Quel talent, voilà une très belle idée d’hommage à M. Eluard que je cite régulièrement notamment dans mes deux modestes ouvrages. Quel toupet ! J’ai aimé ce billet Miss Opalie ! Bises et très belle journée sous la lumière de craie. Jonas

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    • louv' 16 février 2015 / 12:00

      Plus je le lis, plus je l’aime ! Il ne m’en voudra pas je pense 😉
      Bises et belle journée à toi.

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  4. jplduvar 15 février 2015 / 10:33

    Très beaux mots en effet…..Bises et bon dimanche, Jean-Pierre

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    • louv' 15 février 2015 / 10:42

      Merci Jean-Pierre, bon dimanche à toi. Bises

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  5. breizhdand 14 février 2015 / 18:44

    Une jolie façon de faire vivre la littérature. Bises Dan

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    • louv' 14 février 2015 / 22:10

      Merci beaucoup, Dan. Amitiés.

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  6. Carmen P. (Erin) 13 février 2015 / 23:24

    La poésie est au service de l’amour et cette évocation est réversible, tes mots en témoignent.
    Tant que l’un existe, l’autre n’est pas loin et les ailes d’un ange les enlacent.

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    • louv' 14 février 2015 / 07:41

      Les ailes d’un ange ou celles d’Eros :)….

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  7. Mony 13 février 2015 / 18:38

    Tout est dans le regard et tant que nous aurons la faculté de réinventer la réalité, nous serons vivants… je crois.

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    • louv' 13 février 2015 / 21:04

      Je le crois aussi, Mony. Tout simplement.

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  8. Dan Eastern 13 février 2015 / 16:55

    Pourquoi peut-on répondre à tous les commentaires sauf aux vôtres chère louv’ ?

    La poésie est à fleur de macadam, de pavé, de terre, de poussière, d’eau…
    Dans la Rue des Commères.

    Vrai !
    Que soit au Café de l’Oiselle, dans l’église de la Rue, sur les bancs que nous avons conservés ou construits, alors que toutes les municipalités les retirent, pour que l’on ne puisse pas s’endormir sous un rayon de soleil ou de lune…

    Un scoop ?

    Oui.
    La poésie, dans la Rue, c’est à fleur de peau, d’iris, de lèvres, de plumes, d’écailles…
    De ces mots non-dit parce qu’ils sont inutiles.

    Nous ne sommes pas des poètes.

    Sourires

    PS : nous apprécions votre côté doux/amer.
    Votre façon de l’exprimer, en douceur alors que chevauchant l’écume d’une déferlante… 😉

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  9. Carole 13 février 2015 / 00:57

    L’inspiration se retrempe toujours à l’aile des grands poètes. Et puis la poésie – je veux dire la vraie – est toujours surréaliste, en fait, non ?

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    • louv' 13 février 2015 / 08:42

      Les plus grands sont une source inépuisable d’inspiration, c’est vrai. Toujours surréaliste la poésie ?…la question est posée 🙂

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    • Dan Eastern 13 février 2015 / 17:29

      Surréaliste la poésie ?

      Innée en tous mais « cérébrale » en certains ?

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  10. emma 13 février 2015 / 00:12

    Un beau jour, ou était-ce une nuit, près d’un lac, je m’étais endormie
    quand soudain, semblant crever le ciel, et venant de nulle part, surgit un aigle noir….

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    • louv' 13 février 2015 / 08:43

      Je n’avais pas fait le rapprochement…mais oui, pourquoi pas ?

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  11. anonyme 12 février 2015 / 17:09

    Un très beau texte, génialement articulé, Surréaliste oui. Tu sais quoi? J’ai cru un moment que le Petit Prince lui-même y avait mis son grain de sel!
    (Je suis anonyme depuis que WordPress refuse mes coordonnées…almanito )

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    • louv' 12 février 2015 / 23:45

      Ben non, c’est Paul Eluard qui a mis son grain de sel 🙂
      Ceci dit, je ne comprends pas pourquoi WordPress refuse tes coordonnées…c’est surréaliste !

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  12. Dan Eastern 12 février 2015 / 15:46

    « Pour en avoir noirci mille pages, pour les avoir prononcés mille fois, la source s’était tarie. »

    Les mots, comme les feuilles, tombent en tournoyant pour se transformer en cet humus fertile qui sera le support de nouvelles pages…

    Et…
    Oui, il n’y a que des rendez-vous, à chaque page tournée à tire d’aile, pour aller rapidement vers la suivante.

    Bonjour sur Opalie. 😉

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    • louv' 12 février 2015 / 23:49

      Que de poésie ce soir ! Même « Rue des Commères », un scoop 🙂
      Bonsoir là-bas.

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